Un chantier permanent. Sans cesse, des grues israéliennes s’activent pour recouvrir les territoires palestiniens d’habitations de nouveaux colons. Dimanche, l’Etat hébreu a annoncé la construction de 884 logements du côté de Jérusalem-Est (la partie arabe de la cité sainte), à l’occasion du « 41e anniversaire de la réunification de la ville » (121 dans la colonie de Har Homa et 763 dans celle de Pisgat Zeev). Intervenue vingt-quatre heures avant une rencontre entre les dirigeants israélien et palestinien, la déclaration a été très mal reçue à Ramallah. Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, a fustigé « la poursuite de la colonisation, principal obstacle sur le chemin de la paix ».
De fait, la Cisjordanie est complètement morcelée, rendant extrêmement épineuse l’ébauche d’un Etat palestinien. La zone est divisée en trois types de secteurs : « A » pour les territoires contrôlés par Ramallah, « C » pour ceux qui sont gérés par les Israéliens et « B » pour les périmètres mixtes - dont la sécurité est cependant assurée par l’Etat hébreu.
La partie « C », la plus vaste, représente environ 60% du total (voir infographie). Quelque 3000 maisons palestiniennes y sont menacées de destruction, selon un rapport publié la semaine passée par les Nations unies. La plupart ont été édifiées sans permis des autorités israéliennes, lesquelles rejettent près de 95% des demandes de construction. « Ces refus de permis à une aussi large échelle font craindre l’existence d’une politique délibérée de la part d’Israël pour encourager un « transfert silencieux » de la population palestinienne en dehors de la zone C », relève l’ONG israélienne La Paix maintenant.
« La Cisjordanie ne reviendra pas complètement aux Palestiniens. Il y a 200 colonies, impossible de toutes les supprimer, admet Ori Shoham, chargé des relations entre le cabinet israélien et la Knesset. Le gouvernement est trop faible pour imposer un retrait total. Les colonies seront regroupées en trois ou quatre points importants. » De plus, le chaos actuel à Gaza fournit un argument aux Israéliens refusant de céder du terrain.
Selon les négociations en cours, les Palestiniens pourraient récupérer 95% de la Cisjordanie, les 5% restants - où se trouvent les plus grosses colonies - étant annexés par l’Etat hébreu en échange d’une portion équivalente de son territoire. « Si les Palestiniens possèdent une zone continue de Jénine à Hébron, alors ils contrôleront l’accès à l’eau de tout le pays, y compris côté israélien. Nous ne pouvons pas laisser faire ça, argue Michael Vromen, porte-parole de l’armée israélienne. C’est la raison de tous les check-points qui quadrillent la Cisjordanie. »
Hébron, justement, est un autre point d’achoppement. La ville abrite le Tombeau des patriarches, site cher aux juifs et aux musulmans. Quelques centaines de colons parmi les plus intégristes y sont installés.
Les lieux saints cristallisent toutes les tensions. Considérée par les Israéliens comme leur « capitale unifiée et éternelle », Jérusalem est également revendiquée par les Palestiniens, à l’est du moins. Plus de 200000 Israéliens se sont cependant implantés dans la partie orientale de la cité depuis 1967. Les sommets des collines entourant la ville sont désormais tous garnis des maisons blanches des colons. Une ceinture d’habitations israéliennes isole Jérusalem-Est - qui comprend la vieille ville, ses églises, ses synagogues et ses mosquées - de la Cisjordanie (voir infographie). Dans l’ancienne zone jordanienne, la population juive a depuis longtemps dépassé la communauté arabe.
Ex-président de la Knesset, Avraham Burg craint que cet imbroglio n’interdise une solution à « deux Etats pour deux peuples ». « Israël a été kidnappé par les colons et la Palestine par le Hamas », déplore le politicien. Les permis de construire, cependant, restent délivrés par les autorités.